Retour sur la création de Cobea avec l’un de ses fondateurs, Jean-Louis

08/18/2021

Jean-Louis, co-fondateur de Cobea Coop

À la rencontre de Jean-Louis, co-fondateur de Cobea

Jean-Louis, alias “Loo-is” pour les intimes et JL chez Cobea, a un parcours plutôt atypique. Diplômé en psychologie du travail à l’ULB, c’est à cette occasion que son chemin croise pour la première fois celui de Chris, coopérateur chez Cobea. Grâce à un stage dans le monde des médias en ligne, Jean-Louis fait ses premiers pas dans le monde digital. Après quelques expériences professionnelles dans des agences, il se lance en tant que consultant indépendant en stratégie digitale pour des PME et des petits clients. Il a également travaillé avec de plus gros clients pour analyser l’ergonomie des sites internet et les expériences utilisateurs (UX).

Après une première rencontre sur les bancs de l’ULB, les chemins de Chris et JL se croisent à nouveau. À l’instar de la psycho, tous deux sont dorénavant actifs dans le secteur du digital. Ils commencent à collaborer sur l’un ou l’autre projet, et petit à petit, c’est l’aventure Cobea qui pointe le bout de son nez.

Aujourd’hui, JL est un peu moins impliqué dans la coopérative. Jeune papa, il a eu envie de se rapprocher du monde de la musique et exerce dorénavant en tant qu’entrepreneur dans des projets culturels. Il mène par exemple le projet de “la Jacqueline” et “l’audiothèque”.

Une coopérative en gouvernance partagée, l’idée qui séduit rapidement les deux passionnés du web

Après plusieurs années de travail et de réflexion, le projet d’une plateforme collaborative ouverte se dessine progressivement. Chris et JL s’intéressent de plus en plus aux coopératives et apprécient l’idée de se démarquer des autres agences. Très vite, ils entendent parler de Coopcity, qui accompagne des projets en Économie Sociale. Hourra, ils sont acceptés à Coopcity et partent à la rencontre de leurs parties prenantes. Pendant cette période, ils apprennent énormément et commencent à valider quelques hypothèses.

Quand cette idée de coopérative commence à germer dans leurs esprits, Chris et Jl participent également à de nombreuses formations et événements. Cela leur permet de rencontrer beaucoup d’acteurs du secteur de l’Économie Sociale et d’être entourés par “les meilleurs”, avant de concrétiser leur projet.

Le 28 mai 2016, Cobea voit officiellement le jour avec la signature des statuts de la coopérative chez le notaire. Un acte formel souligné de grosses accolades, qui leur fait un peu penser à un mariage. L’objectif de cette union? Créer une plateforme collaborative ouverte, accessible au plus grand nombre et qui s’éloigne des standards habituels des grosses agences web. Au début, il ne sont que deux à avoir des parts dans la coop, mais grâce à leurs nombreuses rencontres, ils ont le sentiment d’être bien entourés.

Entre création de site sur wordpress, relation client, gestion de projets, développement et réflexions autour du projet coopératif… Chris et JL avaient de nombreuses casquettes au début de leur collaboration. Très vite après la fameuse signature, ils se déchargent du côté technique de la création de site en s’associant à de nouveaux coopérateurs. Les rôles se répartissent. JL développe davantage la partie “workshop”, tout en assurant la co-gestion de la coopérative avec Chris et la création, plutôt laborieuse, des premiers pas d’une gouvernance partagée.

Un fonctionnement atypique dans le monde du digital

Tout d’abord, ce qu’il a aimé dans l’idée d’une coopérative, ce sont les valeurs que ce type d’entreprise véhicule et défend. Ensuite, le fait que ça soit inhabituel dans le secteur de la création de sites web. Habituellement, pour créer un site internet, on passe soit par un freelance, soit par une grosse agence. La création de sites web nécessite un grand nombre de connaissances et donc de profils différents. L’idée de Cobea était donc de rassembler plusieurs travailleurs indépendants au sein d’une même structure.

L’autre idée derrière la coop était d’impliquer davantage les clients, afin qu’ils deviennent eux-mêmes acteurs de la coop. Qui mieux que les clients pour énoncer leurs besoins? En tant que webdesigner, dev, chef de projets, on n’a pas toutes les réponses et il y a un grand intérêt à être flexibles et ouverts, afin que différents types d’acteurs puissent coopérer et répondre au mieux aux besoins communs.

Cobea, une deuxième vie pour la structure de Imajique

Avant même de commencer sa carrière, JL avait déjà un lien très proche avec le monde du numérique. Son père, Jacques, a créé en février 88 “Imajique”, une entreprise visant à donner des cours d’informatique. Avec le temps, ce dernier utilise un peu moins cette structure et JL intègre l’entreprise pour ses activités professionnelles.

Quand est venue l’heure de concrétiser le projet “Cobea”, deux choix s’offrent donc à Chris et JL. Utiliser la structure d’imajique, entreprise saine et inactive, ou utiliser l’entreprise de Chris, à l’époque associé avec une autre personne. Ils optent pour la première solution, notamment en hommage au père de JL, décédé en 2013, et qui les avait largement soutenus aux prémices du projet.

Créer une coopérative : des défis, en veux-tu en voilà !

Cobea devient donc officiellement une coopérative en 2016, mais tout est encore à inventer et ses fondateurs font face à de nombreux défis. Créer une coopérative, cela demande beaucoup de travail administratif et juridique, mais heureusement, ils sont bien accompagnés. Avant même de “vivre” la coopérative, il faut être en mesure de répondre à de nombreuses questions et à réfléchir en amont à la gouvernance partagée, sans même s’être lancés. Au début, tout est très théorique et ils doivent s’appuyer sur les nombreux interviews réalisés auprès des acteurs de l’Économie Sociale afin d’établir les bases de la coop.

Ce qui leur prend le plus de temps? La gouvernance partagée et l’intelligence collective. Il est très compliqué de s’en sortir seul et il vaut mieux se faire accompagner par des professionnels. Cobea fait donc appel à l’Université du Nous pour se faire épauler pour cette partie. Il y a beaucoup de choses à mettre en place et c’est plutôt compliqué. JL pensait que cette partie allait être plus rapide, mais il a fallu un peu de temps pour que chacun puisse s’imprégner à son rythme tout en apprenant le métier. Au début, ils ont du mal à s’y retrouver financièrement et investissent beaucoup de temps et d’énergie pour permettre au projet de fonctionner. Grâce aux conseils de l’université du Nous, ils mettent en place des rôles et une gestion des RH pour que chacun trouve sa place, se sente autonome, valorisé et reconnu.

 

gouvernance partagée

la gouvernance partagée

 

L’autre défi qui a marqué l’esprit de JL c’est le côté technique de la création de sites. Cobea fonctionne avec WordPress, le constructeur de page Beaver et de nombreux plug-ins. Pour les développeurs qui arrivent dans la coop, un certain temps est nécessaire afin de s’approprier ce qui a été mis en place par le premier développeur.

Le jeu en valait la chandelle

Selon JL, ce qu’il y a de plus intéressant dans Cobea, c’est sa dimension humaine et son engagement dans l’économie sociale. Il y a énormément d’efforts qui sont mis en place au sein de la coop pour fonctionner différemment que les agences classiques et pour mettre l’humain au centre des préoccupations. Ensuite, il y a aussi le fait que Cobea se met au service de projets porteurs de sens.

Aujourd’hui, il est assez fier de voir les sites réalisés par la coop, les clients avec lesquels elle travaille et le fait qu’elle soit devenue un acteur et une référence dans l’Économie Sociale. Le subside reçu pour le projet Scale Up en est selon lui une preuve et une certaine reconnaissance de Cobea dans ce secteur. Malgré les difficultés rencontrées, la coop est parvenue à se faire une réputation au fil des années.

La coopérative avance au fur et à mesure, il y a plus de personnes impliquées et cela fonctionne de mieux en mieux. Cela a peut-être pris plus de temps que ce qu’il pensait à la base, mais comme toutes les bonnes choses, il faut un certain temps pour que cela se construise et puisse fonctionner sur le long terme. JL pense également que le fonctionnement en gouvernance partagée de Cobea pourrait servir d’exemple pour d’autres agences dans le digital, car c’est encore très rare actuellement.

Dans 5 ans, Cobea

JL est très fier de voir que le site de Cobea s’est fait une nouvelle beauté, que les clients sont de plus en plus pointus et que la coopérative a une réelle crédibilité dans le paysage coopératif bruxellois. Il est également heureux de constater que Cobea a trouvé une vraie stabilité. L’équipe est soudée, rémunérée (tant pour le travail d’agence, que pour le temps dédié au fonctionnement interne) et valorisée pour tout le travail effectué.

Certes, une gouvernance partagée nécessite plus de temps et de réflexion qu’une gouvernance “classique”. Surtout quand ce sont des indépendants qui travaillent ensemble, il y a toujours des urgences à gérer et cela devient prioritaire. Et pourtant, pour qu’une gouvernance partagée puisse fonctionner, il faut pouvoir y consacrer du temps. C’est donc une grande réussite pour Cobea d’avoir trouvé une façon de rémunérer ses travailleurs pour toutes les tâches liées à la gouvernance.

S’il devait souhaiter quelque chose à Cobea, c’est que petit à petit, la plateforme devienne réellement accessible à tous, grâce à des formules axées principalement sur la formation. Les formations visant à autonomiser les clients sont déjà en place chez Cobea, mais selon JL, cela pourrait être encore plus accessible à tous, par exemple, financièrement parlant.

Une deuxième chose que JL aimerait voir évoluer dans les années à venir, c’est la diversité des profils dans les coopérateurs et qu’il y ait plus de professionnels, de clients et de citoyens… En attendant, JL souligne les efforts mis en place par la coopérative pour y parvenir. Notamment grâce au projet Scale Up qui vise, entre autres, à faire rayonner Cobea via une campagne de communication externe.

Aujourd’hui, où en est le co-fondateur de Cobea, passionné de musique?

En 2016, JL, alias Loo-is dans le monde de la musique, a relancé sont projet de soundsystem “La Jaqueline”. Créé en 2011 avec son père et ses frères, il s’agissait à l’époque d’un soundsystem installé dans le coffre d’une voiture. Quand il a voulu relancer le projet, JL a décidé d’adapter le concept au vélo plutôt qu’à la voiture. Aujourd’hui, La Jaqueline se définit comme “un collectif musical bruxellois rassemblant des amoureux de musique, des makers et des cyclistes qui fabriquent des soundsystems mobiles durables pour faciliter la diffusion de musique dans la ville.” Il participe à divers évènements en tant que DJ mobil, dont un rassemblement de cycliste 1 fois par mois.

 

la jaqueline brussels

La Jaqueline

 

Un projet en entraînant un autre, il a créé avec d’autres personnes le collectif “Make It Sound” installé à See U qui regroupe 6 ou 7 projets. Il y a installé un atelier afin que chacun puisse créer son propre soundsystem mobile (veloblaster). Un autre projet à lui s’est également inscrit dans le collectif, l’audiothèque (site réalisé avec Cobea héhé). Il s’agit d’un projet d’économie circulaire qui “remet en circulation les appareils audio en les sauvant de l’oubli ou de la destruction”. Donc en gros, c’est un “Fablab audio durable” : un lieu qui propose différentes activités (formation, workshops, rencontres…) visant à transmettre un certain savoir-faire et à sensibiliser le public à des thématiques comme la réparation, l’upcycling, le do it yourself audio.. . Pas mal, n’est-ce pas?

On vous invite à découvrir tous ces projets très prometteurs créés par JL. Perso, chez Cobea, on adore! Bon, c’est sûr, JL nous manque un peu dans la Coop… mais on est super heureux qu’il puisse s’épanouir à travers tous ces projets et sa passion pour la musique!